Depuis septembre 2012, les 750 horodateurs de Strasbourg sont équipés de la technologie NFC (Near Field Communication ou communication en champ proche). Ceux-ci offraient déjà aux usagers la possibilité de payer par carte bancaire. Désormais, inutile d'insérer sa carte de crédit et de taper son code, il suffit de la passer devant l'horodateur pour effectuer le paiement. Idem avec un téléphone portable. Dans ce cas, le montant du stationnement est automatiquement reporté sur la facture téléphonique. “C'est une première mondiale !” se félicite-t-on au service de la ville. “Le manque de monnaie est une source de stress pour les usagers, nous voulions leur apporter confort et modernité”, indique Régis Auriol, responsable du service stratégie et gestion du stationnement à Strasbourg qui se félicite : “Le paiement électronique et sans contact représente 21 % des transactions, nous n'avions pas de tels scores avec Monéo* !
Le montant moyen du ticket est plus élevé, ce qui compense la commission bancaire à reverser : le système n'a pas engendré de dépenses supplémentaires, il s'autofinance. En plus, nous avons économisé la manipulation de 10 tonnes de pièces de monnaie.”
Seule restriction : il faut que le développement de ce service aille de pair avec l'équipement des utilisateurs en mobiles et cartes bancaires NFC...
Aujourd'hui, 12 millions de cartes de paiement sans contact circulent en France ainsi que 3 millions de téléphones**. Strasbourg n'a pas voulu s'engager trop vite sur la voie de la dématérialisation, par souci d'accessibilité, mais Régis Auriol pronostique tout de même “la fin d'un règne”, celui des horodateurs. “Si dans dix ans il y a encore ces grosses tirelires sur nos trottoirs, c'est que nous aurons loupé un virage technologique.”
TICKETS ET PARCMÈTRES BIENTÔT OBSOLÈTES ?
À Mulhouse, ce “virage technologique” a été amorcé il y a un an. L'horodateur n'est plus un détour obligé, et le ticket en voie de disparition avec le “SMS parking” développé par SFR Collectivités. En effet, il suffit à l'automobiliste d'envoyer sa plaque d'immatriculation par SMS. Au choix : une heure ou deux de stationnement qui seront débitées sur sa facture téléphonique (auquel s'ajoute le coût du SMS si l'usager ne dispose pas d'un forfait illimité).
Quelques minutes avant la fin de la période de stationnement, il reçoit une alerte SMS lui proposant de la prolonger à distance. Quant aux agents de contrôle, ils sont munis, en plus de leur appareil à contravention électronique, d'un smartphone sur lequel il leur suffit de taper l'immatriculation d'un véhicule pour en contrôler le paiement.
“Au départ les gens trouvaient cela bizarre, même mon épouse a eu du mal à s'y mettre mais l'essayer, c'est l'adopter !”, assure Thierry Nicolas, adjoint au maire en charge du numérique à Mulhouse, qui dénombre aujourd'hui 8 000 utilisateurs pour un parc de 2 400 places de stationnement sur voirie.
LE STATIONNEMENT AU JUSTE PRIX
“Le SMS est déjà une technologie un peu datée”, tacle Philippe Lerouge, Directeur Général de Paybyphone. Sa société propose aux collectivités pas moins de 7 canaux de paiement, “adaptés aux capacités de chacun”. Outre le paiement par SMS, les usagers peuvent régler via un serveur vocal, une appli smartphone, un site Internet mobile ou depuis n'importe quel ordinateur connecté. Là encore, le stationnement peut être prolongé à distance, mais il peut aussi être écourté. “C'est le stationnement au juste prix !” s'exclame Philippe Lerouge.
Issy-les-Moulineaux, connue pour son engagement dans le numérique, a testé le dispositif il y a 10 ans avant de l'étendre à tout son centre-ville en 2010. Eric Legale, en charge de l'innovation à la ville, se dit “ravi”. “Et le fait que ce soit plus simple pousse les automobilistes à payer davantage”, a-t-il observé. “Avant, on payait en fonction de la monnaie qu'on avait en poche, mais avec Paybyphone, on paye en fonction de la durée souhaitée. Mécaniquement, le prix du ticket moyen augmente”, explique Philippe Lerouge. Le dispositif se répand comme une traînée de poudre. Il vient d'être déployé à Boulogne-Billancourt, Reuilly, Bourg-la-Reine, Nice... et devrait bientôt arriver au Havre, à Vanne, Beauvais. Le marché, pour l'heure embryonnaire, est très prometteur. “Dans cinq ans, toutes les villes y seront passées, c'est indéniable” poursuit le Directeur Général de la société leader mondial des services de paiement par mobile. “À Londres, la technologie existe depuis 5 ans, 90 % du stationnement est géré par Paybyphone donc progressivement, ils ont enlevé les horodateurs.” Pour Eric Legale, ils pourraient, au contraire, devenir de véritables condensés de technologie, “avec de nouvelles fonctionnalités, comme un écran tactile permettant d'accéder aux différents services de la commune, diffusant des informations...”.
LE PIAF, L'HORODATEUR PERSONNEL
Et si les horodateurs disparaissaient des trottoirs pour mieux repousser sur les parebrises ? C'est le choix qu'ont fait certaines collectivités comme Lille, Reims, Valenciennes, Marseille, Grenoble, Épinal, Troyes, etc. avec le PIAF, l'horodateur individuel. Une fois garé, l'automobiliste choisit sa zone de stationnement, et appuie sur le petit boîtier pour lancer le débit de son crédit stationnement. Du paiement à la minute, utilisable en voyage dans toutes les villes équipées. Il reste malgré tout une hérésie pour les ambassadeurs du paiement à distance : la tendance est au téléphone portable tout-en-un plutôt qu'à la multiplication des appareils.
Le PIAF a vu le jour en 1993 mais, fonctionnant avec des cartes prépayées, il n'a pas connu le succès escompté. La deuxième version est arrivée en octobre 2011, elle permet un rechargement chez soi, via Internet ou sur des bornes en ville. Depuis, les ventes s'envolent.
À Troyes, 600 boîtiers nouvelle génération circulent, alors que seuls 150 de la première version avaient été vendus. Et le prix du boîtier (environ 25 euros) est remboursé aux usagers par la municipalité via un crédit temps de stationnement équivalent.
UN TRANSFERT DE CHARGES VERS L'USAGER
Mais, au-delà du gadget, ces nouvelles technologies permettent-elles de réelles avancées ?
Thierry Delvaux, consultant en stationnement au cabinet d'expertise Sareco, est sceptique : “À l'origine, le stationnement payant et sa pénalisation, ont été inventés pour décongestionner les rues, favoriser la rotation. Aujourd'hui, il est toujours aussi mal payé et respecté, donc toutes les solutions sont bonnes pour redresser la barre ! Les systèmes modernes de paiement flattent l'utilisateur et l'incitent à payer.
Mais, pour la collectivité, plus on s'éloigne du parcmètre à pièces, plus il y a une cascade d'intermédiaires à rémunérer : l'opérateur mobile, la banque, la société qui développe la technologie. Et puis, c'est aussi un transfert de charges vers l'usager qui doit lui aussi s'équiper, avoir un téléphone, une carte, un boîtier... Surtout, si ces nouvelles technologies améliorent le quotidien, elles n'ont qu'un impact marginal sur le vrai problème de fonds du stationnement : la pénurie de places et le partage de l'espace.”
* Porte-monnaie électronique lancé il y a une décennie et permettant de régler des sommes jusqu'à 30 euros.
** Chiffres mars 2013, Observatoire du NFC et du sans contact qui fédère les acteurs du secteur et agrège les données.