“Le rapport à la voiture est en train de changer en profondeur”, se réjouit André Gallin, président de la branche loueurs du Conseil National des Professionnels de l'Automobile (CNPA).
“Les jeunes adorent la voiture mais elle n'est plus un signe de réussite comme chez leurs parents. Aujourd'hui, plutôt que posséder, ils préfèrent se faire plaisir en louant une voiture adaptée à chaque occasion : une citadine pour une journée shopping, un cabriolet pour une escapade à deux, un monospace pour des vacances en famille, un 4x4 pour une virée entre amis... L'offre est vaste, les véhicules ont en général moins de 6 mois et sont équipés en fonction des besoins. Dans ces conditions, pourquoi acheter ?”, interroge-t-il, rappelant qu'une voiture coûte en moyenne 5 500 € par an à son propriétaire. À ce souci économique s'ajoutent d'autres facteurs : une prise de conscience écologique et le développement des RTT avec les 35 h.
Courtiers : des conseils et des prix attractifs
Et à mesure que la demande croît, de nouveaux acteurs apparaissent sur le marché. À côté des loueurs traditionnels (Hertz, Avis ou Europcar, etc.) qui ont tous, en parallèle, une deuxième marque low-cost (Interrent, Budget...), sont arrivés les courtiers (Holiday Auto, Auto Escape...). Eux, fonctionnent, à l'instar de distributeurs, comme l'explique Isabelle Duval, Directrice Générale d'Auto Escape : “Nous avons des contrats avec des loueurs du monde entier, des compagnies internationales mais aussi des loueurs locaux. En négociant des volumes à l'année, nous parvenons à avoir des prix attractifs. Et comme nous n'avons pas de contrat d'exclusivité sur une destination, nous pouvons nous engager auprès de nos clients sur la disponibilité d'un véhicule : en cas de surbooking, il sera redirigé vers un autre loueur.”
Pour se démarquer, l'entreprise mise sur le conseil, par téléphone et via son site Internet : “nous nous considérons un peu comme une agence de voyages”, poursuit-elle. La société guide les clients dans le choix du véhicule et donne quelques recommandations en fonction de la destination, sur le taux d'alcoolémie autorisé au volant, les vignettes nécessaires, les péages à l'entrée des grandes villes...
La chasse aux frais cachés avec les comparateurs
Depuis quelques années, une nouvelle strate a émergé. Au-dessus des courtiers, on trouve désormais les comparateurs. “Nous sommes tout en haut de la pyramide, nous référençons les tarifs des courtiers et permettons la réservation directement depuis notre site”, décrit Geoffroy Dickson, le PDG de voituredelocation.fr. Le site mise sur l'accompagnement du client : “nous sommes son seul interlocuteur, de la réservation à la restitution”. Mais son principal argument est “la transparence sur les prix” : “nous garantissons le meilleur tarif, inférieur ou égal à celui du courtier. Sachant que dans la location de voiture, la dernière minute n'existe pas. Plus on s'y prend tôt, moins c'est cher. En Europe du sud, les prix flambent à l'approche de la haute saison, ils vont jusqu'à quadrupler”, prévient Geoffroy Dickson.
Le site fait aussi de la pédagogie sur les contrats d'assurance. En cas d'accident responsable, les dommages subis sont payés par l'assurance du loueur mais la franchise reste à la charge du client. Elle varie de 800 à 4 000 €, en fonction de la catégorie du véhicule. Il est conseillé de souscrire une assurance supplémentaire pour le rachat de franchise, entre 7 et 17 € par jour. D'autres points peuvent entraîner des frais supplémentaires : la location d'équipements (GPS, sièges auto, etc.), l'âge du conducteur (moins de 25 ans) ou l'ajout d'un deuxième conducteur. Quant au kilométrage, s'il reste illimité à l'étranger, il faut bien souvent se borner à 250 km/j dans l'Hexagone pour ne pas alourdir la facture.
Gare au plein d'essence
Toujours pour éviter les mauvaises surprises, Geoffroy Dickson, “recommande fortement” à ses clients de “vérifier minutieusement l'état du véhicule à la restitution”, quitte à “prendre des photos”. “Ne repartez jamais sans un reçu du loueur stipulant que tout est conforme, sans quoi la caution pourrait être automatiquement débitée pour couvrir d'éventuelles réparations.”
En cas de litige, le comparateur joue les intermédiaires. Une fois la location terminée, chaque utilisateur est invité à laisser un commentaire sur le site du comparateur. Riche de plus de 16 000 avis, le comparateur met en garde contre une nouvelle pratique : “Normalement, on loue et on restitue un véhicule avec le plein. Depuis peu, certains loueurs, notamment en Espagne, en Grèce, à Chypre, affichent des prix très bas, à 5 €/jour sauf qu'ils font payer le premier plein environ 100 € car ils facturent des frais de service. Ils demandent ensuite de restituer le véhicule le réservoir vide et là encore, ils sont gagnants car c'est impossible, il y a toujours une quantité restante !” En ce moment, les principaux motifs de réclamation concernent l'attente au comptoir et l'état des véhicules.
La voiture en libre-service, nouvel allié du tourisme urbain
Autre possibilité pour des vacances en France : partir en train et utiliser à destination une voiture en libre-service, comme Auto'trement en Alsace, Autocité+ à Angers, Mobilib' à Toulouse...
Pensée à l'origine comme un service de proximité pour répondre aux besoins occasionnels des citadins, elle commence à être utilisée par les mêmes mais à des fins touristiques. Les opérateurs d'une cinquantaine de villes françaises se sont regroupés en une structure coopérative : Autopartage France. Et l'animateur du réseau, Joël Steffen, d'expliquer : “Grâce au travail sur l'interopérabilité que nous avons mené, un abonné peut utiliser sa carte de membre chez tous les opérateurs du réseau quand il voyage.” L'abonnement s'élève en moyenne à une dizaine d'euros mensuels, auxquels il faut ajouter la location à 2,50 €/heure et 0,35 € du km.
Reste sans doute le moins cher du marché : louer la voiture de son voisin. “Nos tarifs sont 30 à 40 % moins chers que chez les loueurs et courtiers”, assure Ariane Pélizot, la directrice de Buzzcar.com, un site Internet qui met en relation les propriétaires de véhicule et les clients. “Un système qui séduit les jeunes, des trentenaires connectés”, décrit-elle. Deux applications mobile ont été développées par l'entreprise : l'une pour réserver, l'autre pour faire l'état des lieux du véhicule en utilisant le smartphone comme appareil photo. Une commission de 30 % permet à l'entreprise de couvrir les frais d'assurance, d'assistance et de service. Car même s'il y a “une grande part de confiance” dans la location entre particuliers, Ariane Pélizot organise “la continuité du voyage ou le rapatriement en cas de panne vu que les véhicules ne sont pas toujours très récents.”
“Réguler cette nébuleuse” et miser sur les nouvelles technologies
“Concurrence déloyale”, objecte André Gallin, représentant les professionnels du secteur (CNPA loueurs). “On joue tous sur le même terrain mais pas avec les mêmes règles du jeu. Les particuliers n'ont pas les mêmes contraintes en termes de sécurité, de qualité, ne déclarent pas leur chiffre d'affaires et ne payent pas de TVA.” Il a interpellé le Ministère des finances pour “réguler de toute urgence cette nébuleuse” alors que “la bataille tarifaire exerce déjà une pression intenable sur les prix” : “on loue aujourd'hui une paire de skis aussi cher qu'une petite voiture alors que le prix d'achat est loin d'être le même !” “La priorité pour le client, ce n'est pas le bas prix mais la proximité. C'est ce qui ressort régulièrement de nos enquêtes”, assure André Gallin. Or, question proximité, ils doivent cette fois rivaliser avec un autre concurrent : la grande distribution, et son maillage incomparable de magasins sur le territoire. Pour résister et gagner en proximité, les professionnels font le pari des nouvelles technologies, de la dématérialisation. “Avant, il fallait faire un détour par une agence. Aujourd'hui, il suffit d'avoir un smartphone : il permet de réserver, s'enregistrer, repérer la voiture garée au plus proche de soi, la déverrouiller, faire l'état des lieux, payer.”