EuroTest : Passages piétons en Europe : Des améliorations nécessaires

Chaque année en Europe, plus de 8000 piétons sont tués dans des accidents de la route ; un quart de ces accidents mortels a lieu sur un passage piéton. Et tandis que, dans la plupart des pays européens, le bilan de la sécurité routière s’améliore, les accidents mortels impliquant des piétons sont, eux, en hausse.

15/12/2009
5 minutes

C’est un constat préoccupant, qui a incité les Automobile Clubs à tester les passages piétons européens pour la seconde année consécutive. En effet, dans le cadre du programme Eurotest, 17 Automobile Clubs ont analysé les passages piétons de 31 villes, dans 22 pays d’Europe.

A raison de 10 passages piétons par ville, c’est au total 310 passages qui ont été testés à Barcelone, Belgrade, Berlin, Bratislava, Bruxelles, Bucarest, Budapest, Copenhague, Dubrovnik, Francfort, Genève, Helsinki, Istanbul, Ljubljana, Luxembourg, Madrid, Milan, Munich, Naples, Oslo, Paris, Prague, Rome, Rotterdam, Séville, Stockholm, Strasbourg, Vienne et Zagreb.

Afin que la comparaison entre les villes soit probante, des conditions similaires ont été fixées pour choisir les passages piétons testés : proximité du centre-ville, zones touristiques, présence de divers moyens de transport, circulation dense, etc…

Classement complet (57.98 Ko)

Dépliant Piéton en tout sécurité (1.63 Mo)

Dossier de presse (171.46 Ko)

La méthodologie du test

Les tests ont été effectués de jour et de nuit, du 3 juin au 24 septembre 2009 par des inspecteurs de l’Automobile Club d’Italie (qui ont parcouru au total plus de 240 kms à pied), qui ont évalué les passages piétons selon différents critères : l’état général du passage (durée du feu rouge, marquage au sol, panneaux, etc…), la visibilité de jour et de nuit et son accessibilité (notamment pour les personnes handicapées).

Dans chaque zone, 10 passages piétons ont été inspectés, en tentant de couvrir toutes les situations possibles: passage signalé ou pas, voies à une ou deux voies, sens unique et double sens, etc......

La méthodologie a été élaborée par une équipe de l’Université de Rome, qui a retenu 25 paramètres de sécurité qui ont été définis et classés dans quatre catégories

Aménagement spatial et temporel (contribution au classement total : 23%)

  • distance à traverser (d’un trottoir à l’autre)
  • points de rencontre piétons véhicules
  • ilots centraux
  • cycle de feux exclusivement réservé aux piétons
  • efficacité d’une phase de transition entre feu vert et rouge pour piétons
  • durée du feu rouge piétons
  • compte à rebours pour le signal piétons
  • entretien du revêtement
  • entretien du marquage au sol
  • entretien des feux
  • Visibilité de jour (contribution au classement total: 26 %)

  • Distance visuelle minimale (distance nécessaire à un conducteur pour reconnaitre la présence d’un piéton sur le point de s’engager au niveau du passage)
  • Visibilité de la signalisation du passage piétons (pour les conducteurs)
  • Visibilité du marquage au sol (pour les conducteurs).
  • Largeur du passage piétons.
  • Marquages spécifiques d’indication du trafic (exemple: signal de danger).
  • Visibilité de nuit (contribution au classement total : 32 %)

  • Conditions d’éclairage
  • Distance visuelle minimale de nuit (distance nécessaire à un conducteur pour reconnaitre la présence d’un piéton sur le point de s’engager au niveau du passage)
  • Visibilité de la signalisation nocturne du passage piétons (pour les conducteurs)
  • Visibilité nocturne du marquage au sol (pour les conducteurs).
  • Accessibilité (contribution au classement total: 19 %)

    • Présence d’un abaissement de la bordure du trottoir au niveau du passage piétons
    • Présence d’un revêtement tactile (pour les déficients visuels)
    • Présence de signaux acoustiques (pour les déficients visuels)
    • Présence d’obstacles (véhicules stationnés, trous, signalisation, etc...) pouvant représenter un risque pour les piétons ou pouvant les dissuader d’utiliser le passage piétons
    • Largeur de la bordure de trottoir.

    Les passages piétons ont été notés sur la base d’un système de points aboutissant aux mentions suivantes : “Très bon, Bon, Acceptable, Insuffisant, Très insuffisant » 

    Résultats globaux

    Les 310 passages piétons testés ont été classés en 5 catégories allant de « très insuffisant » à « très bon ». 184 passages piétons - soit environ 60% - ont été jugés positivement, avec 170 « bons » et 14 « très bons », tandis que 73 (1 sur 4) sont classés « acceptables ». Il est à noter que 53 passages piétons (soit 1 sur 6) ont raté le test : ils ont été notés « insuffisants » ou « très insuffisants », alors qu’ils étaient seulement 1 sur 8 l’an dernier.

    Le pire passage piéton a été trouvé à Milan, tous les critères de sécurité ont été jugés négativement, en particulier la visibilité de jour et de nuit. A l’inverse, le meilleur se trouve dans la ville de Bratislava : un passage piéton en excellent état de maintenance, une très bonne visibilité de jour comme de nuit (feux et panneaux annonçant le passage), très bonne accessibilité pour tous les usagers, etc…

    Globalement, c’est donc Bratislava qui ouvre la marche de ce classement, suivie par Londres et Munich. Strasbourg occupe la 5e place de ce classement et 3 de ses passages piétons se situent dans les 10 meilleurs passages testés en Europe ; la ville de Paris se classe en 15e position. On trouve les pires passages piétons en Italie, dans les villes de Naples et Milan.

    Résultats français

    A Strasbourg le test a été mené le 23 juin 2009 dans le centre historique, le secteur de la Grande Ile à proximité de la Cathédrale et de la zone piétonne. Les passages piétons strasbourgeois ont été relativement bien notés, puisque 3 d’entre eux ont été qualifiés de « très bons » et se retrouvent dans les 10 premiers.

    Les points forts essentiels de ces passages piétons sont la bonne visibilité de nuit, la vitesse réduite des véhicules, due à la zone piétonne, et le bon état général (marquage au sol, etc…)
    Quelques points négatifs ont été soulevés, comme des voitures garées aux abords du passage et obstruant la visibilité, la trop longue durée du feu rouge piéton (120, voire 150 secondes), le tram passant juste à proximité du passage ou la dangerosité des passages mixtes piétons-cyclistes.

    A Paris, le test s’est déroulé le 25 juin 2009, dans le secteur « Montparnasse – Jardin du Luxembourg », une zone touristique proche du cimetière et de la Tour Montparnasse.
    Les passages piétons parisiens s’en sortent un peu moins bien que les strasbourgeois mais restent tout de même bien notés, le meilleur passage se trouvant en 15e position du classement.
    Leurs points forts sont la bonne visibilité de nuit, le bon état général (marquage au sol, feux,…), tandis que certains défaut ont été relevés, comme le fait que les voitures arrivent trop vite sur le passage piéton, des véhicules garés qui cachent la visibilité, ou un îlot central trop étroit par rapport au nombre de piétons qui traversent.

    Les résultats parisiens complets (2.97 Mo)

    Les résultats strasbourgeois complets (2.62 Mo)

    Les recommandations : pour des passages piétons plus sûrs

    Recommandations aux urbanistes et aux administrations

    • Une bonne visibilité pour tous les passages piétons est une des grandes priorités : il faut éviter les obstacles limitant la visibilité entre les piétons et les voitures
    • Une ligne d’arrêt implantée à une distance de 6 à 15 mètres avant le passage piétons, rendrait l’arrêt plus facile pour les véhicules et augmenterait la visibilité
    • Installer des îlots centraux lorsque les passages piétons sont très longs pour éviter les situations dangereuses
    • Des panneaux réfléchissants ainsi que d’autres éléments augmentant la visibilité de nuit devraient être mis en place
    • Les passages piétons devraient systématiquement être maintenus en bon état et faire l’objet d’un bilan de sécurité régulier
    • Aux passages piétons disposant de feux, les différentes phases devraient être calculées de façon à laisser traverser les piétons en toute sécurité.
    • L’accessibilité des passages piétons aux personnes handicapées devraient être assurée par des trottoirs rabaissés au niveau de la route ou des pentes (maximum 8%) et par des signaux ou des dispositifs tactiles installés sur les feux

    Recommandations aux législateurs

    • Il est urgent d’introduire une série de règles communes au niveau européen. Les grosses différences qui existent entre les pays dans les relations piétons/conducteurs peuvent être déroutantes et dangereuses pour les touristes et visiteurs étrangers.
    • Une uniformisation est souhaitable concernant la phase de transition entre le feu piéton vert et rouge (par exemple un feu vert qui passe au feu vert clignotant avant de passer au rouge)
    • Une uniformité concernant le marquage au sol est également nécessaire, le plus visible de jour comme de nuit est le blanc, sur le noir de l’asphalte

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